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05/07/2013

La négociation transatlantique sans les Etats européens concernés...

 

Un coup d’Etat peut en cacher un autre ou, du moins, en amoindrir la perception : ainsi en a-t-il été, ce mercredi 3 juillet, alors que tous les regards médiatiques étaient tournés vers la place Tahrir du Caire, en Egypte. Au même moment, Bruxelles et Berlin décidaient, contre l’avis premier –à peine écouté…- de M. Hollande encore une fois isolé et impuissant, d’entamer dès lundi prochain les négociations pour la création d’une vaste zone de libre-échange transatlantique, tandis que, dans la foulée et quelques heures après, la France refusait l’asile politique à celui qui avait révélé (mais est-ce vraiment une révélation ?) l’importance de l’espionnage des institutions, entreprises, ambassades des pays européens par les Etats-Unis !

 

Ainsi, lundi 8 juillet, sera lancé officiellement un processus qui, en définitive, en finira avec le rêve (l’illusion ? Sans doute pas si simple…) d’une Union européenne indépendante, puisqu’elle « raccordera » (pas seulement économiquement mais aussi réglementairement et sans doute « socialement ») purement et simplement les pays de l’UE aux Etats-Unis, dans une relation qui risque bien de souligner un peu plus la vassalisation du Vieux continent à l’hyperpuissance américaine, ce que de Gaulle avait tenté, par son projet d’une Europe confédérale des Etats, d’éviter à tout prix. Bien sûr, dans ce processus, il y aura des gagnants en Europe, en particulier l’Allemagne qui a su s’imposer ces dernières années au détriment de son partenaire (son égal ou son concurrent, pouvait-elle penser en d’autres temps…), un certain nombre de multinationales (désormais baptisées plus justement « transnationales ») et la Commission européenne, à la manœuvre, qui est la seule habilitée à négocier au nom de l’Union et à pouvoir mener les négociations, ce qui n’est guère rassurant quand on sait ses penchants d’un extrême libéralisme. La France a beau avoir obtenu l’assurance que son « exception culturelle » serait préservée, dans la réalité rien n’est moins sûr ! M. Barroso, sinistre président de la Commission européenne, a rappelé haut et fort que les négociations étaient bien du seul ressort de celle-ci et qu’elle avait reçu mandat par les Etats pour ce faire ; un commissaire européen n’a pas hésité à affirmer que, de toute façon, l’avis de la France pourrait être négligée, si besoin est (selon les négociateurs…), y compris sur ce que notre pays croit avoir protégé ! La menace d’un veto français apparaît, à ce propos, de plus en plus improbable…

 

Le renoncement du mercredi 3 juillet de M. Hollande, car c’en est bien un, qu’on le veuille ou non, montre aussi que les dirigeants de la République n’ont guère d’égards pour le peuple français, qu’il soit électoral ou plus vaste : cet abandon entre les mains d’une Commission qui va jouer son rôle et même, sans doute, profiter de l’occasion pour le redéfinir et le renforcer, n’est qu’un aspect, le plus triste peut-être, de ce véritable coup d’Etat politique européen qui va engager le continent tout entier, au nom de l’économie et des principes de libre-échange et de libéralisme économique, dans une situation que les nations et les peuples n’ont pas souhaité et ne souhaitent sans doute pas.

 

La mise à l’écart des peuples et des Etats par les institutions européennes, prouve à l’envi que cette « Europe légale », de plus en plus, se coupe de ce que l’on pourrait nommer « l’Europe réelle » : il n’est pas sûr que les conséquences d’une telle attitude de la Commission européenne (le terme « trahison » est-il trop fort ?) mais aussi des gouvernements (de moins en moins souverains et politiques) et des parlementaires européens soient heureuses…

 

 

17/07/2008

Méduses et thon rouge.

Une information passée quasi-inaperçue, sauf pour les vacanciers qui se baignent dans la Méditerranée : la recrudescence des méduses près des côtes, qui peuvent rendre désagréables les baignades lorsqu’elles frôlent les baigneurs… Ce n’est pas la première année que cela arrive, bien sûr, mais le phénomène se reproduit désormais de façon de plus en plus régulière sans que les municipalités puissent faire grand-chose, à part faire ramasser celles qui s’échouent sur les plages. La principale raison évoquée jadis était la chaleur caniculaire mais ce n’est pas vraiment le cas cette année. En fait, la raison la plus certaine est la raréfaction des prédateurs naturels des méduses dont, plus particulièrement, le thon rouge, aujourd’hui surpêché, au risque de déstabiliser toute la chaîne alimentaire méditerranéenne.

 

Comme le signalent les spécialistes, le thon rouge est aujourd’hui pêché au-delà des normes raisonnables, ce qui a entraîné une autre conséquence très visible, la diminution de la taille moyenne des thons pêchés et, donc, du poids moyen de ceux-ci : si j’ai bien entendu ce qui était évoqué à la radio, la moyenne serait désormais de 25 kilos par bête au lieu de 60 il y a quelques années. D’autre part, les capacités de pérennisation de l’espèce seraient gravement atteintes puisque l’on pêcherait le double de ce qui naît, au risque de voir le stock disparaître purement et simplement dans moins de cinq ans !

 

Ainsi, la leçon de la disparition de la morue de Terre-neuve n’a visiblement servi à rien, et l’on refait les mêmes bêtises à quelques années d’intervalle, en se disant que l’on trouvera toujours un substitut ou que l’élevage industriel pourvoira aux demandes des consommateurs… Erreurs dramatiques, comportements irresponsables !

 

Cette année, la Commission européenne a déclaré les quotas de pêche atteints plus tôt que prévu et a intimé l’ordre aux chalutiers français de cesser toute pêche au thon rouge, ce qui ne gêne pas outre mesure des navires venus d’autres pays ou d’autres continents qui, eux, continuent le pillage de façon systématique grâce aux moyens technologiques modernes (sonars et satellites pour repérer à coup sûr les bancs de poissons, par exemple, ce qui ne laisse pas beaucoup de chances aux poissons en question de passer entre les mailles du filet…). Il faut dire que la pêche reste rentable puisque la demande, jusque là principalement asiatique (et particulièrement nipponne), s’est diversifiée et ne cesse d’augmenter, grâce à la mode « mondiale » des sushis : une conséquence malheureuse, pourrait-on dire, de la mondialisation et de l’uniformisation des goûts et des habitudes alimentaires. Et l’accession de nouvelles puissances, démographiquement importantes, à la « société de consommation » multiplie le nombre de consommateurs potentiels qui veulent « faire comme les autres »…

 

Les pêcheurs français de la côte méditerranéenne n’ont pas réagi favorablement aux décisions de Bruxelles, ce qui peut se comprendre au regard de leurs intérêts et des traditions de pêche de notre pays. Mais, au lieu de « sévir sans proposer », la Commission a donné le bâton pour se faire battre, et se contenter de subventions ou d’indemnités, dans une logique purement comptable, reste insuffisant, voire insatisfaisant.

 

Que faire, alors ? S’il me semble important de « relâcher la pression » sur les ressources halieutiques (et pas seulement sur le thon rouge, mais aussi sur les raies et les squales, eux aussi menacés de disparition à court terme en Méditerranée) et donc de limiter les prises, cela ne suffit pas et néglige le sort des pêcheurs, en particulier des « petits », des « artisans de la mer », qui risquent de disparaître eux aussi au profit des grandes entreprises aux pratiques plus dictées par les intérêts des actionnaires que de leurs personnels ou de l’environnement. Aussi, me semble-t-il, la France doit (et par le biais de cette Union pour la Méditerranée baptisée le ouiquende dernier à Paris, elle peut le faire) imposer un véritable moratoire sur les espèces menacées (la simple limitation de pêche semble aujourd’hui insuffisante) mais engager en même temps un véritable programme de préservation et de renouvellement (donc de pérennisation) des ressources halieutiques par la mise en place de « trames bleues », principalement dans les zones de frai et de développement des poissons, cela pour permettre à la pêche méditerranéenne de survivre lorsque la Méditerranée nourricière aura « repris son souffle » et retrouvé son équilibre propre.

 

Les pêcheurs doivent être associés à cette politique : plutôt que les subventionner à « ne pas pêcher » ou financer la « casse des chalutiers », il vaut mieux financer leur travail de « jardinier des mers » en attendant que certaines ressources soient à nouveau suffisantes pour en autoriser l’exploitation, exploitation dont ils seraient alors les premiers bénéficiaires. Cela impose de réfléchir à une nouvelle conception et organisation des « métiers de la mer », et ce n’est pas le Marché qui peut le faire (puisque son principe moteur, y compris à court terme, est la recherche du profit financier, pas toujours compatible avec la « longue durée » nécessaire au respect de l’environnement), mais les instances de l’Etat : la France a un devoir en Méditerranée et au regard des générations futures, et elle doit donner l’exemple et, mieux encore, donner l’impulsion à cette politique fondée sur « le souci environnemental » et sur la « transmission de l’héritage ». La République saura-t-elle assumer ses responsabilités ? S’il faut bien sûr le souhaiter, il est permis, au regard de ses principes et de l’histoire récente, d’en douter : la Monarchie serait sans doute plus appropriée aux défis environnementaux à relever et à la résistance à opposer aux groupes de pression financiers et économiques qui ne manqueront pas de se manifester dès que leurs intérêts immédiats seront « menacés »…

 

09/05/2008

9 mai, journée de "l'Europe".

(Je me permets de republier un article déjà mis en ligne sur mon précédent blogue il y a 2 ans, à l'occasion de la "journée de l'Europe", car il me semble avoir gardé un certain intérêt...) 

 

 

 

 

Le 9 mai est, depuis quelques années, institué « journée de l’Europe » et c’est l’occasion d’une vaste promotion (certains diraient propagande…) pour les bienfaits de l’Union européenne, présentée comme seul et unique horizon glorieux des habitants du continent européen et parfois au-delà, puisque l’Union n’est pas, ne se veut pas, une entité purement géographique ni même seulement « européenne »… Un an après le rejet de la Constitution européenne, pour des raisons d’ailleurs fort diverses et parfois contradictoires, par les Français et les Néerlandais, les partisans de l’U.E. reprennent l’offensive et en particulier en direction des plus jeunes, par le biais de l’Education Nationale : ainsi, des « kits » destinés aux enseignants ont été envoyés à ceux-ci pour propager la « bonne nouvelle ». J’ai bien sûr reçu ce kit qui se compose d’une affiche, d’un quiz européen et d’un prospectus sur la citoyenneté européenne qui me fait penser à un prospectus d’agence de voyages : d’ailleurs, à lire ce dernier, l’Union européenne c’est vraiment formidable et surtout sans souci… En U.E., « tout le monde, il est beau ; tout le monde, il est gentil », pour reprendre le titre et l’esprit du film éponyme de Jean Yanne. Que ce 9 mai soit l’occasion de présenter l’Union européenne, son histoire et ses institutions, ses projets et ses perspectives, cela n’a rien en soi pour me choquer.

Mais, que cela soit juste une « opération séduction » sans véritable discussion, sans évocation des débats importants qui se posent en U.E., sans esprit critique ni recul même par rapport à certains problèmes actuels, cela me semble fort malsain et s’apparente à la politique de la « République obligatoire » qu’a pratiquée la IIIe République à travers sa stratégie scolaire, si peu respectueuse des traditions et des libertés provinciales mais aussi de l’histoire française au point, parfois, de la travestir de façon ridicule. En veut-on un exemple ? alors, prenons l’événement que, justement, l’on commémore ce 9 mai, la fameuse déclaration de Robert Schuman, alors ministre français des Affaires étrangères, le 9 mai 1950 et annonçant la CECA  : elle fut préparée dans le plus grand secret, rédigée en fait dans ses grandes lignes par Jean Monnet ; les ministres français, pourtant collègues de Schuman, tout comme les diplomates du Quai d’Orsay, ne furent même pas prévenus de ce qu’elle contenait, mais, par contre, Schuman en informa … le chancelier fédéral d’Allemagne de l’Ouest et les dirigeants états-uniens… Comme le signale Michel Clapié, auteur du manuel « Institutions européennes » (Champs Université ; Flammarion ; 2003), et à qui je dois d’avoir beaucoup appris sur la manière dont s’est construite et se construit toujours l’U.E. : « La gestation de cette Déclaration ne fut donc pas un « modèle de transparence démocratique » »…

D’autre part, il serait intéressant de relire cette fameuse déclaration qui annonce aussi la stratégie européiste vers ce que Schuman appelle la « Fédération européenne » : on comprend mieux alors pourquoi De Gaulle s’y oppose et pourquoi Schuman, dès le retour du Général à la tête de l’Etat, rentre dans une opposition acharnée à l’homme du 18 juin 40, alors que ce dernier lui avait évité, à la Libération, « un procès que son attitude pendant le conflit [la seconde guerre mondiale] incitait certains à lui faire » (Michel Clapié, dans le livre cité plus haut, page 373). Effectivement, petit détail « amusant », Schuman fut membre du Gouvernement Pétain du 16 mai au 17 juillet 1940, et il a voté les « pleins pouvoirs » au Maréchal Pétain le 10 juillet… De plus, malgré sa foi chrétienne et son anti-nazisme avéré, il se refusera à rentrer dans la Résistance, préférant (mais après tout, pourquoi pas ?) une vie monastique pendant laquelle il prie pour la paix, en attendant des jours meilleurs… On peut néanmoins préférer la foi combattante d’un Honoré d’Estienne d’Orves, d’un Colonel Rémy ou d’un De Gaulle…

Alors, je veux bien que l’on fête l’Union européenne le 9 mai ou un autre jour, mais cela ne doit pas empêcher de penser librement à l’Europe sans céder à la tentation de la propagande ou de la sacralisation…